Economie : Comprendre le report d’échéances au sein des Microfinances face aux effets du Covid-19 !

 

Afin de gérer la crise de la pandémie COVID-19 et assurer la continuité des activités des institutions financières, plusieurs outils ont été déjà diffusés. L’une des mesures proposées par la BCEAO est le report d’échéances au sein des banques et institutions de microfinance (IMF). Il est important que cette mesure soit appliquée sur une base structurée et harmonisée, afin d’éviter les dérapages, et aussi canaliser et maîtriser les implications de la mise en application du dispositif sur la situation des institutions, et du secteur financier dans son ensemble.

 

 

C’est quoi le report d’échéances ?

Le « report d’échéances » peut se définir comme une suspension des remboursements d’un concours financier sur une période bien définie, suite à une situation conjoncturelle qui ne permet pas aux débiteurs de répondre aisément à leurs engagements. L’opération peut être nécessaire en cas de difficultés financières passagères ou durables.

En effet, un report d’échéance est un avantage accordé à l’emprunteur par le prêteur afin de reporter le paiement d’une ou plusieurs échéances à une date ultérieure. Le report d’échéance équivaut à une interruption temporaire du remboursement des mensualités d’un prêt. Si le contrat de crédit le prévoit, l’organisme financier peut accorder un report d’échéance. Le report d’échéance n’augmente pas le montant de la mensualité suivante mais il rallonge la durée de remboursement du crédit en question.

 

 

Lors de la mise en place du report d’échéances, la banque remet à l’emprunteur un nouveau tableau d’amortissement indiquant le montant et la durée du prêt. À l’issue de cette période de suspension, l’emprunteur reprend le remboursement mensuel de son crédit.

Le report d’échéances, tel que recommandé par la BCEAO dans l’Avis n°008-04-2020, consiste à suspendre le paiement du capital et des intérêts pendant une durée de trois mois renouvelables une fois. Le client ne doit avoir aucune charge additionnelle d’intérêts, ni de frais ou de pénalités de retard résultant dudit report. Toutefois, le paiement de l’assurance du crédit ou de tous autres frais perçus par l’IMF pour le compte de tiers, n’est pas concerné par la mesure de report.

 

 

Quelle est la réalité à ce jour ?

L’avis de la BCEAO relatif au report d’échéances est entré en vigueur le 27 avril 2020. Chaque institution déterminera la date effective de son démarrage en son sein. La BCEAO précisera la fin de la période le moment venu. Mais après plusieurs mois, la réalité est que :

  • Beaucoup d’IMF ne maitrisent pas les contours du report d’échéances, et ne la pratiquent pas ou très peu ; on note une très faible appropriation des dispositions/ avis de la BCEAO et les outils proposés pour les effectuer (eg le guide de report d’échéances mise en ligne depuis le 13 mai). Certaines IMF pensent à tort que reporter les échéances est synonymes de renoncer aux échéances et aux intérêts, pas du tout !!!

 

 

 

 

  • Beaucoup de clients n’ont pas connaissance du report d’échéances ou en ont une compréhension erronée ; de plus certains clients éligibles au report n’en feront pas la demande ; a contrario d’autres non éligibles la feront ! et il appartient donc à l’IMF de les discerner, et ceci ne pourra se faire sans une véritable appropriation du dispositif ;

 

  • Même si le report devra se faire sur demande formelle des clients, il est important que l’IMF les identifient et le leur expliquent ; parce que en réalité les plus gros perdants, ce sont les IMF ; les clients ne supportent pas les provisions/ pertes sur créances et les déficits qu’elles induisent !!

 

 

 

Quels sont les avantages du report d’échéances ?

  • Pour l’IMF

Le report d’échéances :

  • Réduit les charges de provisions : le report « bloque » les retards sur la période considérée, et donc les provisions y associées ; reporter les échéances, c’est comme « bloquer » momentanément l’évolution d’une gangrène, et concentrer les efforts sur son traitement. Plus les retards augmentent, plus les crédits migrent vers la droite de la balance âgée, avec des taux de provisionnement de plus en plus élevés ; les provisions grèvent le résultat de l’IMF

 

  • Permet d’avoir une idée claire sur les clients affectés par la pandémie, en vue d’envisager les accompagnements possibles pour la nécessaire relance des activités. Un crédit affecté par la pandémie, mais non reporté crée des « impayés artificiels » pour des clients de bonne foi

 

 

  • Evite ou Facilite les discussions avec le client, afin de trouver ensemble les mécanismes et les conditions de récupération du crédit et de relance de la croissance du portefeuille…renforce dans une certaine mesure la fidélisation de la clientèle

 

  • Permet d’avoir une idée claire des effets de la pandémie sur la situation et l’IMF : les crédits affectés sont formellement identifiés, de même que les échéances reportées ; ceci constitue un repère important vis-à-vis des partenaires pour montrer les difficultés rencontrées et les éventuels accompagnements à solliciter…

 

  • Pour les clients des IMF

Du côté du client, le report d’échéances :

  • Evite les pénalités de retard et les autres frais dus aux effets de la pandémie
  • Evite la méfiance et l’éloignement généralement créés par les situations d’impayés
  • Affermit la confiance vis-à-vis de l’IMF, dans la mesure où il lui est démontré qu’elle est sensible à sa situation, de même que sa volonté de l’accompagner et de poursuivre le partenariat…

 

Le report d’échéances est-il facultatif ?

 

Si le report d’échéances n’est pas une obligation, il parait en toute évidence comme une recommandation forte pour renforcer la résilience et la relance des activités des IMF.

 

 

Il doit y avoir une vie après la covid19 ; on doit pouvoir vivre avec la covid19 ; la covid19 ne doit pas compromettre définitivement la pérennité des IMF… Dans la forêt où le lion (Covid) rugit, la gazelle aussi vieillit (IMF pérennes) !!

 

PS : Cette période de report des échéances est prorogée jusqu’au 31 décembre 2020. Les créances qui demeurent affectées par les effets de la pandémie de la Covid-19 peuvent être maintenues dans les créances saines pendant cette période et traitées comme telles dans leurs catégories respectives au plan prudentiel. Ce traitement préférentiel réglementaire prendra fin le 31 décembre 2020.

 

 

Avec Dr AMOUSSOU Kossi  (Expert-conseil en finance inclusive Coach en Gouvernance/ Gestion du crédit)