« …Ce 8 mars, qu’avons-nous à fêter, nous les femmes togolaises ? »

 

Mme Maryse Quashie n’est plus à présenter. Dans une lettre ouverte à ses « sœurs togolaises », l’universitaire et actrice de la société civile se pose des questions sur les vrais sens de la fête du 8 mars, Journée des droits des femmes. Au-delà des pique-niques et des festivités, Maryse Quashie invite ses sœurs à faire de cette journée de 8 mars, une journée pour exiger l’amélioration des conditions de vie et de travail de toutes les femmes du pays. Lecture!!

 

 

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LETTRE OUVERTE A MES SŒURS TOGOLAISES A PROPOS DU 8 MARS

Voici ce que j’ai appris : à l’occasion du 8 mars, mes sœurs togolaises, certaines d’entre vous s’apprêtent à aller participer à des pique-niques, habillées d’un pagne spécial qu’elles ont acheté et fait coudre, elles se préparent pour aller se réjouir. Alors, le 8 mars serait-elle donc une fête des femmes, comme la fête des Mères qui célèbre les mères, la fête des grands-mères qui met à l’honneur des grands-mères ?

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MAIS CE 8 MARS 2022, QU’AVONS-NOUS A FÊTER, NOUS LES FEMMES TOGOLAISES ?

-Allons-nous célébrer le fait que, plus notre famille est pauvre, moins nos filles ont des chances d’aller à l’école, moins elles ont de chances d’aller longtemps à l’école, allons-nous célébrer le fait que nos filles profitent moins de l’école que les garçons ?

-Allons-nous nous réjouir de ce que notre travail harassant à la maison, aux champs, n’est guère reconnu puisque sur notre carte d’identité (lorsque nous en avons une) il est indiqué que nous n’avons pas de profession ?

-Allons-nous fêter nos difficultés à trouver un moyen de faire garder nos enfants lorsque nous sommes obligées de travailler en vue d’améliorer les revenus de notre famille ? Allons-nous fêter ces longues heures à trimer pour entretenir un commerce qui ne rapporte presque rien, à exercer sans considération sociale notre métier de couturière, de coiffeuse, d’aide à domicile ?

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-Allons-nous nous réjouir de ce que, malgré tous nos efforts, nous n’arrivons pas à faire manger nos enfants à leur faim, de ce que nous sommes obligées de les faire dormir dans les deux petites pièces que nous partageons à sept, de ce que nous n’arrivons pas à les faire soigner convenablement ?

Il y a certainement des femmes qui ne vivent pas les difficultés qui viennent d’être citées, et elles participeront donc à ces pique-niques à l’occasion du 8 mars. Mais quelles sont leurs véritables motivations en vérité ?

POURQUOI DES FEMMES FONT-ELLES DU 8 MARS UN JOUR DE FÊTE ?

En fait, comment les participantes aux réjouissances du 8 mars 2022 pourront-elles se réjouir en vérité, elles qui vivent à côté de celles qui ont un quotidien de souffrance ? Achèteraient-elles les produits alimentaires à un autre prix que nous autres ? Paieraient-elles l’électricité, l’eau, le charbon à d’autres tarifs que nous autres ?

-Serait-ce finalement à cause d’elles que lorsque certaines d’entre nous ont voulu protester contre la vie chère, cela n’a pas marché ? En fait, comment les adhérentes aux festivités du 8 mars 2022 pourront-elles chanter dans un pays où elles peuvent entendre leurs sœurs gémir dans les maisons voisines des leurs ? Elles n’auraient peut-être pas à pleurer comme nous autres à cause d’un frère, d’un mari, d’un fils, molesté et brimé, injustement enfermé en prison ?

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N’auraient-elles aucun sujet de plainte par rapport à leur quotidien de femmes, de travailleuses, de citoyennes ?

-Serait-ce finalement à cause d’elles que dans notre pays on a de moins en moins le droit de donner son point de vue, de se plaindre, de protester ? En fait comment les participantes aux réjouissances du 8 mars 2022, peuvent-elles être assez en forme pour aller danser le 8 mars, pendant que d’autres n’arrivent pas à dormir la nuit en pensant à leur descendance ? Ne se poseraient-elle pas de question à propos des chances qu’auraient leurs enfants de trouver un emploi, d’avoir accès à la propriété ?

-Serait-ce finalement à cause d’elles que dans notre pays une minorité s’accapare des richesses en appauvrissant tous les autres pour que leurs descendants ne manquent de rien pendant des générations ?

Cela ne semble pas possible, n’est-ce pas ? En fait, il semble que ces femmes, n’ont pas une correcte compréhension de la date du 8 mars. Nous qui savons ce qu’est le 8 mars, crions-le d’un bout à l’autre de notre pays :

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LE 8 MARS EST LA JOURNÉE DES DROITS DES FEMMES !

Alors aucune d’entre nous ne se réjouira tant que les droits des femmes ne seront pas assurés. Au contraire, nous nous servirons du 8 mars pour réclamer ces droits. Aucune d’entre nous n’acceptera qu’un pique-nique, ou un pagne, puisse la débarrasser de l’angoisse qui enserre nos cœurs lorsque nous pensons au droit à l’avenir dont notre société actuelle prive la jeunesse.

En cela le 8 mars concerne toutes les femmes et tous les hommes de bonne volonté qui luttent pour les droits de tous.

 

Avec iciLome