Dans un texte publié sur les réseaux sociaux, en début de de semaine, Gerry Taama, Député et Président du Net, a touché du doigt un sujet pratiquement rendu tabou au Togo : le Tribalisme. Depuis plusieurs années, le repli identitaire, l’appellation que préfère le politiquement correct, met à rude épreuve, les liens de fraternité. Ces liens que tout le monde entretenait jadis et qui tendent à s’effriter aujourd’hui étaient fondés sur des valeurs de solidarité, de partage et d’équité.
« Puisse notre attachement à la cohésion nationale demeurer le fil conducteur qui nous permette de poursuivre résolument notre marche vers la prospérité partagée en 2021 », dixit Faure Gnassingbé dans son message de vœux aux togolais. En effet, depuis plusieurs années, l’assertion « cohésion nationale », est très présente dans les discours officiels des politiques. Et pour cause, tous sont conscients qu’un élément diviseur gagne de plus en plus de terrain : le repli identitaire. Un réflexe qui est à l’origine du cloisonnement des populations et des conflits. Mais très peu de gens osent aborder clairement le sujet.
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Mais le député Gerry Taama a brisé la glace dans un texte publié, lundi dernier, sur les réseaux sociaux. Pour celui qui revendique avec fierté ses origines «Kabyé », «au Togo, l’hypocrisie fait officiellement dire à tout le monde qu’il n’y a pas de tribalisme ni régionalisme. C’est le plus gros mensonge de notre siècle ». En effet, dans la conscience de nombre de togolais, le mot fait peur. Mais à vouloir enrober le mal d’une langue de soie, le tribalisme se fait désormais quasiment à visage découvert. Des communautés à la base à l’administration publique, en passant par les institutions, toutes sont concernées.
Le tribalisme gagne du terrain
Disons les choses clairement. Le tribalisme fait partie de ces nombreux maux qui minent le Togo. En effet, depuis quelques années, l’on assiste à un tribalisme que participent à institutionnaliser, malheureusement, des politiques. Soit pour gouverner, soit pour asseoir une base électorale. Des Kabyé aux Ewé en passant par les Tems, les Akposso, les Moba ou les Guins, les ethnies se regardent en chien de faïence au Togo.
La cassure est palpable de plus en plus au sein des communautés, marquées par la pauvreté, l’intolérance, la peur de la différence, avec des désirs de conquête et de conservation du Pouvoir. Le manque de démocratie à la base, développe des replis identitaires principalement dus aux sentiments d’injustice et de frustrations qui entretiennent ces clivages.
C’est la logique du « Diviser pour mieux régner », une pratique très politicienne. « Les discriminations ethniques sont tout aussi criardes. Ainsi de glissement en glissade, le Togo est passé de «démocrature» à «ethnocrature» avec tous les germes soigneusement entretenus de potentiels conflits ethniques meurtriers », a souligné dans une Tribune, Kofi Yamgnane, président de SURSAUT.
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Des fiefs et groupuscules se créent au gré des intérêts divers. Le sentiment d’appartenance à la nation s’étiole dangereusement. Les identités ne se reconnaissent plus véritablement en l’Etat et pourtant le brassage des populations est réel. Le sentiment de supériorité d’une ethnie sur une autre et le non-respect des droits humains trouvent un terreau fertile.
« Je crois que c’est le premier frein à notre intégration nationale, à la consolidation de notre nation. Il faut même aller plus loin, l’alternance est à ce prix. Tant que certains penseront que l’alternance c’est chasser une ethnie d’un pouvoir qu’il ne mérite pas, l’ethnie chassée considérera aussi que l’alternance est une question de vie ou de mort, que c’est une lutte d’extermination et qu’il faut résister », affirme le Président du Net.
Tout cela entame aussi malheureusement la vie sociale : les mariages inter-ethniques deviennent souvent un fardeau pour les tourtereaux qui ont décidé de braver les interdictions non-écrites dans certaines contrées.
La question qui se pose est de savoir, comment peut-on surfer sur le tribalisme pour espérer construire une nation harmonieuse ?
La nation en danger…
Aujourd’hui, le tribalisme est une réalité irréfragable. Au Togo comme la majorité de certains pays africains, les soixante ans d’indépendances, décomposés en trente années de règne du parti unique et trente autres de démocratisations aléatoires, n’ont pas fait régresser d’un iota le phénomène. Tel un virus mutant, il a même retrouvé une certaine jeunesse en infiltrant les réseaux sociaux.
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Le vivre-ensemble prôné par Faure Gnassingbé au prix des initiatives pour la réconciliation n’a jamais été aussi en danger. Les communautés à la base sont ébranlées, l’administration publique infectée, les institutions décriées et l’armée accusées.
Il devient donc urgent de construire un idéal commun de paix entre les différentes communautés. L’expression d’un vivre ensemble assumé, qui se traduirait par le renforcement d’un esprit collectif et la promotion de l’excellence au détriment d’une certaine « fraternité basée sur nos provenances », estime un observateur. « Nos intellectuels, surtout les universitaires, les hommes d’église et les institutions devraient se pencher sur la question », conclut Gerry Taama.
Un autre observateur fait remarquer qu’ « aussi vrai que le tribalisme enrhume la démocratie au Togo, la situation est presque autant dans d’autres pays de la sous-région comme en Côte d’ivoire ou en Guinée, tous des pays francophones ».
En effet comme par hasard ces deux autres pays sont d’anciennes colonies francophones comme le Togo. Mais il est aussi vrai qu’au Benin comme au Mali l’alternance n’est pas autant noyautée par les enjeux ethniques. C’est dire que chaque pays doit, pour solutionner son problème, diagnostiquer ses réalités.
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Et c’est en cela que nous soutenons, à Fraternité, que l’une des pistes pour le Togo passe par l’exhumation de notre vraie histoire pour l’embrasser, l’assumer et tracer ensemble et courageusement les sillons d’une vraie nation, seule condition pour garantir les intérêts de tous.
Fraternité