[Enquête] : ces riches femmes d’influence qui font vivre les sectes au Togo

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Longtemps perçu comme une pratique  privilégiée par la gente masculine, l’appartenance aux sectes mystiques et autres réseaux occultes n’est plus l’apanage des hommes au Togo.

 

 

 

A Lomé la capitale togolaise, de riches femmes d’influences provenant du monde politique et des affaires ne cachent plus leur appartenance à ces groupes exotériques comme le démontrent une enquête réalisée par l’Agence Inter Press Service News (IPS) il y a quelques années. Extrait…

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« Divorcée et au chômage depuis un moment, je me suis tournée vers une église et cela m’a permis de trouver un travail et un nouveau partenaire », témoigne Ayélé Ajavon, secrétaire de direction à Lomé, la capitale togolaise.

Ajavon ne peut désormais prendre de décision sans en référer à son pasteur – qui est en même temps son “nouveau partenaire” – à qui elle donne une partie de ses revenus pour l’église. « Je lui dois tout, et l’argent que je verse tous les mois à l’église n’est rien », affirme-t-elle.

 

 

Comme Ajavon, beaucoup de femmes togolaises font confiance aux nouvelles églises qui promettent la vie éternelle, la paix du cœur, le bonheur, la fortune et bien d’autres choses. Mais, la plupart des femmes se font dépouiller de leurs biens par les responsables des sectes qui se font appeler pasteurs.

 

 

« Au sein de la secte appelée ‘Deeper Life’ à Lomé, les femmes doivent remettre au pasteur leurs bijoux en or et en argent, mais on ne sait pas ce que cette secte fait de ces bijoux », déclare Magloire Kouakouvi, professeur de philosophie à l’Université de Lomé.

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Selon lui, le leader de la secte met ses adeptes en condition pour faire passer son message. Il estime que les femmes sont plus nombreuses à fréquenter les sectes au Togo, et qu’elles en sont les principales victimes. « Plusieurs couples se sont séparés à cause de l’absence répétée de la femme qui préfère s’adonner à de longues séances de prière pendant la nuit plutôt que de s’occuper de son foyer », avoue Nadine Lawson-Hellou, infirmière à Lomé.

 

 

 

Mais Lina Apédo, commerçante, n’est pas de cet avis. Elle dénonce une volonté manifeste de vilipender les nouvelles églises. « C’est un faux problème car c’est plutôt les églises qui réunissent les couples”, indique-t-elle. Au Togo, la plupart des sectes évoluaient dans la clandestinité, avant 1990, sous le parti unique; elles subissaient d’incessantes descentes de la police. Mais, à partir du déclenchement du processus démocratique dans le pays, notamment avec la levée de l’interdiction des regroupements religieux, on a assisté à une prolifération des sectes. Le phénomène est en constante progression depuis une dizaine d’années.

Les initiateurs des sectes ont su mettre à profit le marasme socio-économique consécutif aux troubles politiques liés au processus démocratique, au début des années 1990. Très habiles sur le plan psychologique pour interpréter la Bible, ils ont réussi à recruter des adeptes, souvent des femmes, qui ont des problèmes financiers, de famille et de travail.

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Au sein de chaque secte, on se réclame de la Bible et de Jésus Christ.

Chaque regroupement apporte des amendements à la doctrine de départ. “En général, les croyances ne sont pas affichées et c’est dans la pratique qu’il y a des dogmes”, déclare Kouakouvi.

 

 

 

La plupart des sectes se développent à partir des quêtes et des cotisations des adeptes. « Notre pasteur fixait parfois la somme minimum à verser à l’église, à 10.000 francs CFA (environ 17 dollars US”, témoigne Akouvi Dogno, ménagère. “Et comme moi, je n’en pouvais plus, j’ai abandonné », ajoute-t-elle.

Certains regroupements exercent des activités professionnelles. Ils exigent de leurs adeptes des produits qui sont revendus et dont les bénéfices rentrent directement dans les caisses des sectes.

Les sectes reçoivent également des dons de leurs adeptes qui estiment avoir eu satisfaction ou qui espèrent un miracle. « Dans notre église, les dons peuvent être de l’argent, une voiture ou terrain sur lequel on pourra construire une autre église; tout dépend du donateur, et moi, je donnerai tout si j’en ai les moyens », confie Florence Tsikplonou, revendeuse au grand marché de Lomé.

Les sectes développent des pratiques qui s’apparentent parfois aux cultures africaines ou qui constituent un mélange de pratiques ancestrales avec la religion chrétienne.

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Il existe des églises dans presque tous les quartiers de Lomé.

Généralement, elles exercent dans des maisons d’habitation qui sont rapidement transformées en églises, avec des séances de prières nocturnes.

Les sectes exploitent également la libéralisation des ondes, avec la multiplication des radios privées. Elles proposent, sur les antennes des radios, des programmes d’évangélisation. Souvent, les émissions religieuses connaissent des débordements et, parfois, les sectes se font la guerre par radios interposées. “Les gens en Afrique ont une conception magique de Dieu, je veux du travail, je veux me marier, je vais prier Dieu pour que Dieu me donne ce que je veux. Cette conception, les religions établies ne donnent pas cela à leurs fidèles et ce besoin de religiosité est compensé par les visions”, explique Kouakouvi.

Pour le père catholique Casimir Kodo, le manque de dynamisme de l’église romaine explique le succès des sectes. « Les sectes mélangent le terroir et le christianisme, et cela fascine », affirme Kodo.

 

 

Les musulmans estiment que la multiplication des sectes n’est pas surprenante et selon l’imam de la grande mosquée de Lomé, Ibrahim Sylla, le Coran avait prévu cette situation. « Le Coran nous a expliqué cette situation depuis très longtemps et c’est maintenant que les gens commencent à découvrir cela ».

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Pour les adeptes des religions traditionnelles africaines, les sectes sont “démoniaques”. « Dans tous les coins et recoins du pays, c’est des sectes, c’est des gens qui ne veulent rien faire. Ces pasteurs escroquent la population et s’adonnent à de mauvaises pratiques, ils prennent les femmes d’autrui », déplore Augustin Assiobo, grand prête vodou à Lomé.

Les pratiques des sectes défrayent la chronique, avec des cas de viol, d’adultère, de vol et d’escroquerie. Arsène Mensah, secrétaire général d’une association de lutte contre le SIDA, révèle que de “faux pasteurs” déclarent guérir le SIDA. « Ils trompent, à travers leurs prêches, les malades et leurs familles et leur prennent beaucoup d’argent, et souvent, les malades succombent », déplore Mensah.

 

 

« Ce sont de grands escrocs, ces pasteurs », dénonce Joëlle Kloutsé, étudiante. Elle avoue avoir été escroquée, avec sa mère, par un pasteur.

« C’est un jeune homme qui a monté une église dans notre quartier et il a réussi à nous emballer; et après avoir pris de l’argent et des biens chez les fidèles, il est parti avec sa copine aux États-Unis », affirme-t-elle Mais Dieudonné Alouka, responsable d’une secte appelée “Ministère du salut”, n’est pas d’accord avec les accusations lancées contre les pasteurs. Selon lui, ces accusations font partie des manœuvres de certaines personnes déterminées à vilipender le travail des pasteurs.

 

 

TGWB