Un diplomate d’un genre spécial qui, sans en avoir la formation, ne se donne aucune limite dans la confusion des genres. S’il a été, pour sa promiscuité avec le régime et ses attaques contre la liberté de la presse conspué par l’opinion togolaise, Vizy n’ira pas, « à sa demande » et avec le soutien de Lomé, trop loin. Il remplace Véronique Brumeaux à Cotonou. Une exclusive Afrika Stratégies France.
L’annonce de son départ a été reçue, au Togo comme un soulagement. Sociétés civiles et médias le soupçonnent d’être à la solde du régime. Les trois années passées à Lomé furent une catastrophe pour celui dont c’était le premier poste d’ambassadeur. Spécialiste des projets et acteur d’organisations non gouvernementales, Marc Vizy n’ jamais été dans une école de diplomatie. Très vite, avec sa sulfureuse épouse originaire des Antilles qui a fait du poste une opportunité, le couple ne se donnait aucune limite.
L’ambassadeur, sa mère qui a préféré les côtes togolaises à la banlieue parisienne où elle vivait ainsi que son épouse ont été, toute la durée de la mission durant, des hôtes gâtés du président togolais au point où, Agbéyomé Kodjo, principal opposant l’a récemment accusé d’avoir falsifié la lettre de félicitation que Macron a expédiée, dans la confusion, au président togolais, au lendemain de la présidentielle de février dernier.
Un diplomate aux antipodes des pratiques
Il n’est pas un diplomate comme les autres. Entre quelques coupes de champagne au domicile de Robert Dussey, ministre togolais des affaires étrangères et des soirées épicuriennes à Lomé II, résidence du chef de l’Etat, il tenait toujours la chair par le juteux. Alors que la dynastie Gnassingbé dirige le Togo d’une main de fer depuis 55 ans, le diplomate ne trouve rien à dire. Il a insisté, pendant de longs jours, pour que l’Elysée félicite Faure Gnassingbé dès le lendemain de la dernière présidentielle alors qu’une crise électorale historique s’en est suivie.
Il a évité soigneusement de recevoir le principal challenger du président togolais, Agbyomé Kodjo, de peur de froisser ses relations plus qu’amicales. Profitant de la méconnaissance de Franck Paris des dictatures africaines, Marc Vizy a multiplié pour le conseiller Afrique de Macron des séjours réguliers à Lomé. Pas moins de 4 visites en 3 ans, ce qui en fait de loin, un record. Récemment et peu avant de quitter son poste, l’ambassadeur français a obtenu la suspension de Liberté et de L’Alternative, deux journaux togolais les plus critiques à l’égard du pouvoir. Impliqué dans de multiples affaires avec le pouvoir togolais et ses ramifications, il a réussi, à se voir attribuer un poste dans le pays voisin.
Un jeu de chaises musical qui intrigue
Marc Vizy n’a jamais voulu s’éloigner du Togo. Lomé a tenté par tous les moyens de lui obtenir, ce qui était administrativement possible, la prolongation d’un an de sa mission en terre togolaise. Sans y parvenir. Finalement, il est muté, selon une information exclusive Afrika Stratégies France, à Cotonou. Même au Quai d’Orsay, cette affectation dérange les diplomates de carrière. « Quitter un pays pour celui voisin est inédit dans la diplomatie française » confie, à Afrika Stratégies France, sous le couvert de l’anonymat, une diplomate française en poste en Tunisie.
« D’autant qu’il a enchaîné des couacs » s’étonne un autre au Quai d’Orsay. La proximité entre le ministre togolais des Affaires étrangères et le diplomate peut expliquer en partie ce cadeau d’autant que Robert Dussey a tenté d’obtenir une prolongation d’un an pour « son ami ». Aussi, Jean-Yves Ledrian entretient avec les dictatures africaines de « trop cordiales relations » pour paraphraser Jean-Luc Mélanchon, chef de la France Insoumise. Une chose est certaine, derrière cette intrigante mutation plane, dans la suspicion une main invisible, celle du Togo. En restant à côté, celui qui se vante d’être « une oreille de Macron dans la sous-région » pourra continuer à rendre service à Lomé II. Et Dieu sait que Faure Gnassingbé rétribue généreusement la loyauté, combien utile, de diplomates français. Surtout que Vizy a juré « décrocher une audience à l’Élysée pour le président togolais » qui y pense chaque matin en se rasant.
Urgent : l’État d’urgence est prorogé!
Une bonne nouvelle pour Cotonou
Depuis son arrivée au pouvoir en 2016, Patrice Talon enchaîne des coups de grâce à la démocratie. Le président béninois a réussi, par une politique exclusionniste, à écarter aussi bien des élections législatives de l’année dernière et que celles municipales de cette année, l’opposition. Finalement, l’Union progressiste (Up) et le Bloc Républicain (Br), ses deux formations politiques se sont arrogé la totalité des 83 sièges au parlement de Porto-Novo. Idem pour les législatives de mars dernier pour lesquelles les partis constitutifs de la majorité présidentielle se sont accaparés de 70 des 77 communes.
Ceci grâce à des dispositions unilatérales dont notamment un mystérieux récépissé que n’ont pas pu décrocher les principaux partis de l’opposition. Pour se donner toutes les chances d’être réélu en 2021 et alors que son impopularité ne cesse de s’accroître, Patrice Talon introduit, lors de la dernière révision, le parrainage dans la constitution pour le scrutin présidentiel. Ce qui devrait de fait, lui éviter de se confronter à tout adversaire crédible.
Face à cette situation, Véronique Brumeaux commençait par s’agacer et s’en est inquiétée plusieurs fois lors de récentes rencontres avec le président béninois. Avec l’arrivée de Marc Vizy dont la complaisance avec les autorités sur les questions démocratiques est régulièrement dénoncée à Lomé, Patrice Talon devrait disposer d’un partenaire impassible et muet pour se maintenir, aussi longtemps qu’il l’aurait voulu à la tête du Bénin, pourtant jadis modèle de la démocratie dans la sous-région.
MAX-SAVI Carmel,
Afrika Stratégies France