Juriste et gestionnaire des ressources humaines de formation, ce jeune togolais pétri de talent a tout abandonné pour s’adonner à l’humour, qu’il exerce avec tact et doigtées de maitre.
Décembre 2020 il a récidivé avec un spectacle à guichet fermé avec son stand-up « Gédéon ». De son vrai nom Hervé Djessoa et surnommé de tous le « Professeur Abawoé», il se révèle à vous au travers de cette interview. Découvrons-le !
D’où vient ton nom de scène ?
Je n’ai pas choisi ce nom c’est le public qui s’en est chargé. Avant je m’appelais Hervé et pour suivre le mouvement j’ai ajouté « du rire » ce qui a donné «Hervé Du Rire ».
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Mais lorsque j’ai commencé mes chroniques sur le sport je disais souvent « Abawoé » une sorte de cri de détresse, utilisé dans plusieurs langues au Nord du pays. Alors les gens ont commencé par m’appeler « Abawoé ». La chronique a d’ailleurs fini par être appelée aussi comme ça.
Vu que je faisais souvent des analyses avec plus ou moins de pédagogie, les gens m’ont appelé « Professeur » et ça a finalement donné « Professeur Abawoé ». Voilà la triste et très émouvante histoire de mon pseudo ! J’ai envie même de pleurer… Ne me refaites plus ça ! (Rires)
Humoriste, c’était un rêve de gosse ou pas du tout ?
Pas du tout ! Cela ne m’avait jamais effleuré l’esprit quand j’étais gosse. Pour moi j’allais être un ministre un jour. Mais bon ça ce n’est pas perdu! I’m on the way.
J’ai fait le droit, ce n’était pas pour être humoriste mais quand le destin complote derrière toi, même si tu te caches il y a toujours quelqu’un qui dira qu’il sait où tu es. A la rigueur je voulais être journaliste mais un de mes oncles m’a demandé : « Au Togo ??? ». (Rires) Donc je suis tombé dans l’humour par un coup du destin.
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Peux-tu revenir sur ton parcours d’animateur devenu comédien puis humoriste ?
C’est ce que je vous disais plus haut. A un moment donné je voulais être journaliste, animateur etc…donc pendant que je suivais des cours de droit, j’ai participé à un concours d’animation télé sur Zéphyr dont j’ai été lauréat. Ensuite Kouessan Yovodevi , directeur de la TVT à l’époque m’a donné ma chance sur la télévision nationale.
Avec une bande d’amis, on produisait alors une émission sinon un magazine dont je suis le présentateur « Ciné Mag ». Le Directeur nous demanda plus tard de proposer quelque chose d’original en plus. C’est comme ça qu’on a pensé à l’humour mais cette émission ne verra le jour que sur la TV2 qui entre temps nous a fait la cour. On a dû choisir. C’est ainsi qu’on a lancé « le labo du rire », l’émission qui a fait de moi ce que je suis aujourd’hui.
Comment es-tu arrivé au stand-up ?
Le stand-up s’est imposé à moi en fait ! Parce que c’est la forme d’humour à laquelle je m’identifie le mieux. Peut-être parce que je ne suis pas passé véritablement par le théâtre avant l’humour.
Notre émission « le labo du rire » sans le vouloir était déjà du stand-up dans sa forme la plus compliquée.
Mais après il a fallu apprendre beaucoup, lire beaucoup de cours en PDF, regarder les autres faire et surtout décider un jour de monter sur scène.
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On a commencé par monter sur scène lors du tout premier « comedy club » qu’on avait lancé au Togo «le labo du rire en salle» qu’on enregistrait dans des boîtes de nuits à Lomé et à l’intérieur du pays. C’est donc comme ça que j’ai fait mes premiers pas sur scène jusqu’à ce que je ne rencontre Hyacinthe Atta qui va me jeter dans la cour des grands à travers mon premier spectacle complet qui a duré 1h20.
Comment prépares-tu ton stand-up ?
D’abord il faut souligner qu’on a tendance à parler de « One Man Show » à tort ou à raison. Mais il faut dire que même dans du stand-up il nous arrive d’interpréter des personnages et donc de faire du One Man Show. Nous appelons nos spectacles « One Man Show » mais c’est clair que c’est du « Stand-Up » que je fais.
Alors comment je les prépare ? Amenez l’argent et je vous dis. (Rires)
C’est beaucoup de travail. Il faut d’abord choisir le sujet, ensuite faire un brainstorming, rassembler les idées qui se rentrent dedans, créer des vannes, les rassembler aussi pour en faire des sketchs et après rassembler les sketchs pour que ça donne un spectacle. Tu vois qu’on a «trop souffrance » non ? (Rires) Maintenant que le spectacle est écrit on procède à un tri pour éliminer les vannes et sketchs moins efficaces et même faire des inputs. Après cette étape on démarre les répétitions et à la fin le produit final est là.
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As-tu des exemples de sujets que tu aimerais aborder, mais pour lesquels tu as encore besoin de temps ?
Euhhhh disons la Bible et le Coran…Les saintes écritures ! J’ai bien envie d’écrire un spectacle dessus. Vous voyez j’ai le goût du risque. (Rires) Je pense aussi à un spectacle purement politique ! Mais bon tout est en réflexion et puis il y a d’autres sujets que je garde pour moi, donnez l’argent.
Comment décrirais-tu ton humour ?
Je suis dans l’humour d’observation avec de l’exagération, qui peut frôler parfois l’absurde mais je me sens bien dans la satire et le sarcasme !
Dans toutes tes activités, que préfères-tu : écrire, jouer, être face à la caméra ?
On va dire jouer ! J’adore écrire mais l’aboutissement d’un artiste du spectacle vivant c’est d’être sur scène. Les réseaux sociaux et la télé restent une adaptation.
As-tu des inspirations dans les humoristes et stand-uppers plus connus ?
C’est clair que oui. Je regarde beaucoup deux Américains Chris Rock et Trevor Noah, en France ils sont plus nombreux donc difficile d’en citer mais Anne Roumanoff reste une inspiration éternelle. Je regarde aussi beaucoup d’Africains. Mais après il faut trouver sa propre voie et être soi-même sans quoi on n’est pas original.
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Que trouves-tu dans tes spectacles ?
Bah de l’amour (Rires). Mais sérieux de l’amour, de l’amour de gens qui aiment ce que je fais. Quand on fait ce boulot, on se nourrit du bonheur des autres. Et quand on est heureux on dégage de l’amour.Mais après je gagne bien sûr en expérience et puis bon vous le savez je gagne de l’argent !
Quelles sont tes actualités ?
Que de surprises ! Je bosse actuellement sur beaucoup de projets donc ça va tomber sous peu !
Qu’est-ce qui selon toi te démarque des autres humoristes togolais ?
Je suis juste moi-même c’est tout et je ne pense pas que quelqu’un d’autre a le gros nez que j’ai. (Rires). Plus sérieusement je suis moi-même et je cherche toujours à faire les choses différemment en m’adaptant à la demande. Deux choses clés : être soi-même et s’adapter à la demande.
Revenons sur ton dernier spectacle « Gédéon » dans quel état d’esprit l’as-tu écrit et préparé ?
Je l’ai écrit comme tous mes autres spectacles mais avec l’envie d’offrir un spectacle inédit. J’ai écrit en jouant en même temps. Ça fait bizarre mais c’est le spectacle qui le demandait. Il fallait le vivre en l’écrivant pour être sûr de transmettre l’émotion recherchée. Donc en gros c’était exceptionnel ! J’ai envie de recommencer.
Pourquoi le choix du pasteur Gédéon comme source d’inspiration ?
Euh disons plutôt que ce sont les sujets abordés par Gédéon qui ont été une source d’inspiration. Alors pourquoi ? Parce que ce sont des sujets tabous et moi je fais toujours des sujets tabous une source d’inspiration. Et puis je vous l’ai dit plus haut, la religion et les livres saints font partie de mes fantasmes ! Après il faut dire qu’il s’est agi de faits de société, de politique, de religion, de sexe (oups) bref tout y est passé quoi mais avec beaucoup de délicatesse et de respect pour le public. Vous voyez un peu le genre de sujets tabous. Et ce sont ces instants de bonheur et de fous rires qu’on a passé ensemble à l’Institut français.
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Quel est le bilan de cette soirée selon tes attentes ?
Bilan très positif au-delà de mes attentes. D’abord l’entrée qui est à 10 000 et j’ai réussi à faire guichet fermé en pleine crise c’est énorme ! Qu’on m’informe quelques jours avant le spectacle qu’il n’y a plus de tickets j’étais on va dire « waoh » !
Et dire que ce n’est pas la première fois, l’année précédente j’avais aussi fait le plein de la salle, guichet fermé avec mon spectacle « le bal des anciens ».
Bref j’étais satisfait en amont et après le spectacle c’était encore exceptionnel ! Voir des gens rire autant pendant près de 2h et les voir très satisfaits à la fin tu as le sentiment du devoir accompli ! Il faudrait vivre cette expérience pour pouvoir comprendre. (Rires)
Depuis le début de ta carrière quel a été ton pire moment sur scène ?
Bah ça remonte en 2019 sur l’esplanade du palais des Congrès. J’ai préparé un sketch puisque je devais faire juste 10min de scène. Le jour-J, je sors sur scène et devant moi il n’y avait que des badauds qui ne comprenaient rien à mon sketch.
Il y avait de grandes personnalités notamment l’actuel Premier Ministre. Mais le rire il est contagieux vous savez quand beaucoup ne tient pas, ça ne rit pas du tout. Les badauds étaient surexcités ils attendaient Almok.
Vous savez comment ça se passe les spectacles gratuits à l’air libre. C’est tout le monde et « n’importe qui » qui vient. Donc au finish c’était l’un de mes pires moments de stand-up ! Je m’étais refusé d’improviser sinon j’aurais pu changer de sketch mais non je suis allé jusqu’au bout malgré tout et après je n’ai pas pu dormir.
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Depuis quelques mois tu fais partie des ambassadeurs de la société Togocom, quelles sont les retombées sur ta carrière ?
Je m’habille désormais en jaune de la tête aux pieds, même mes sous-vêtements. (Rires) Vous savez, signer avec une telle institution est une reconnaissance pour le travail que tu fais depuis des années. On n’en demande pas beaucoup. C’est vrai il y a l’argent, il ne faut pas se mentir. Mais cette reconnaissance est la plus grosse satisfaction.
Après c’est bon pour l’image de l’artiste et ça donne du boulot ce qui est bien pour tout homme puisque vous le savez « le travail libère l’homme ».
On parle souvent de votre physique de beau gosse, cela t’aide à percer ?
Sérieux ! Je suis beau ? Bah je ne savais pas (Rires) Il faut dire que ça n’a jamais été facile d’être beau quand on est humoriste. Parfois quand tu as un physique fabriqué à la main ça facilite la vie. Tu vois mon frère Folo ? Attention je ne dis pas qu’il n’était pas beau hein mais il avait un physique atypique. C’était plus facile pour lui de produire du rire. Alors que moi qui suis on va dire un peu normal, il me faut donc plus de travail. Quand tu as un physique comme le mien tu dois bosser trois fois plus que les autres et c’est quand le travail est bien fait que ton physique peut être un atout.
Que faut-il faire pour te plaire et qu’est-ce que tu aimes chez une femme ?
En bon africain j’aime les fesses ( Rires ). Ça c’est des clichés. Mais ne nous voilons pas la face j’aime les bonnes choses, j’aime quand les choses sont au point tu vois un peu ? Après tu sais toutes les femmes sont belles et moi ce que je recherche c’est l’intelligence et l’ambition, ces deux qualités ajoutées à ce que j’ai dit plus haut me suffisent.
Ta botte secrète pour séduire les femmes ?
Sérieux je ne vais pas tout dévoiler ici ! Attention c’est des secrets professionnels ça. Respectez le boulot des gens !
Le Professeur est-il un cœur à prendre ?
Euh le Professeur Abawoé est un cœur à prendre mais Hervé DJESSOA est pris ! Le professeur Abawoé travaille chaque jour pour séduire encore plus de monde donc il y a de la place pour tous dans son cœur.
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Un projet d’exportation de ton spectacle ?
Oui bien sûr on est en train de travailler dessus. J’ai déjà commencé l’exportation de mes spectacles depuis l’année dernière et ça va se poursuivre avec beaucoup de bonnes nouvelles qui arrivent !
Quels sont tes projets ?
Surprise surprise ! Soyez patients ! (Rires)
Un seul projet : conquérir le monde !
Focus Infos No 264