Les secrets d’une visite à l’Elysée : voici pourquoi Agbéyomé Kodjo ne sera pas évoqué

 

 

 

Ça serait sa première visite d’amitié et de travail en France cette semaine. Faure Gnassingbé sera reçu par Emmanuel Macron. Les deux hommes devront évoquer la situation au Sahel où le président togolais renforce son influence, le cas du Mali et la pandémie de Covid-19. Lomé II a fait savoir au président français qu’il ne veut pas parler d’Agbéyomé Kodjo. Une doléance à laquelle Paris n’a trouvé aucun inconvénient. Alors que tous ses pairs sont passés chez Macron, le togolais sera le dernier à être reçu. « Rien ne le pressait » clame son entourage fortement mobilisé.

 

 

 

 

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Ce soir, pas moins de 49 places ont été réservées sur Air France, en direction de Paris. La délégation présidentielle arrive demain matin par vol commercial. Faure Gnassingbé devrait suivre dans la journée où Calixte Madjoulba, son ambassadeur dans l’hexagone, le recevra à l’aéroport du Bourget, près de Paris, en compagnie de Robert Dussey qui quitte Lomé ce soir, ainsi que le directeur de la communication de la présidence. Un test de communication et de marketing d’ailleurs pour Kouessan Yovodévi d’autant que Reckya Madougou, longtemps conseillère spéciale en charge de la communication et du marketing n’a pas pu faire le déplacement. Celle qui est devenue entre temps opposante au Bénin, son pays d’origine, est détenue à la prison de Missérété, près de Porto-Novo la capitale, où Patrice Talon défère ses « dérangeurs » politiques. Elle a pu, la semaine dernière, faire parvenir un message à son ex patron, le locataire de Lomé II.

L’ancien directeur général de la télévision nationale togolaise qui a pris le pilotage de la com présidentielle depuis septembre dernier profite de son escale à Abidjan pour activer, à distance, contacts et réseaux dans la capitale française. Car, comme toute l’équipe, il a été pris de court. Le trop introverti président togolais n’ayant rien dit à personne, jusqu’à lundi de Pâques.

 

Faure Gnassingbé vient en maître du Sahel

Faure Gnassingbé qui a passé une journée normale, discutant avec ses collaborateurs des contours d’un voyage qu’il a longtemps attendu tout en camouflant son émotion. « Ce voyage n’est pas déterminant dans son quotidien de chef d’Etat » lance un de ses ministres qui ne trouve pas le périple « indispensable« . Sauf que, alors que tous ses pairs ont été reçus par le jeune président français, le chef de l’Etat togolais n’aurait pas vu d’un mauvais œil de faire son tour emblématique au Palais du dirigeant de l’ex puissance colonisatrice. Ça sera chose faite ce vendredi, à 13h15 où, après une séance de travail avec les deux délégations, d’un côté celle menée par Robert Dussey et de l’autre Jean-Yves Ledrian, les deux chefs d’Etat auront un tête à tête d’une demie heure environ.

 

 

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Aucun déjeuner n’est prévu à l’heure actuelle en marge des discussions. Emmanuel Macron déjeunera, normalement, seul, avec son épouse au Palais après le départ de son hôte.  Faure Gnassingbé, attendu à l’hôtel Shangri-la, avenue Iléna, dans le 16e arrondissement, qui a fait de sa secrétaire générale, Sandra Johnson, un pion incontournable de ce voyage ne devrait pas revenir immédiatement à Lomé. Une escapade est prévue à Milan ou aux États-Unis. Le président togolais maintient le flou sur la suite, lui qui a instruit son entourage pour que « rien ne fuite ». Sur le vol Air France qui part de Lomé ce soir à 19h20 pour arriver demain 6h25 à Paris via Niamey, les réservations ont été faites au dernier moment, en début de journée ce mardi.

 

 

 

Le Mali et le Sahel au cœur des discussions

Ces derniers jours, le Sahel était au cœur de l’agenda du président togolais. Il a tenu à participer personnellement à l’investiture de Mohamed Bazoum, nouveau président nigérien à qui, en décembre dernier, il avait apporté son soutien par un bref séjour à Niamey ainsi qu’un appui financier important. « Plus d’un million d’euro pour sa campagne« , susurre l’entourage. La France qui entend quitter le Mali d’ici 2023 veut compter sur le contingent militaire togolais au Mali pour prendre la relève. Ce qui a inspiré à Robert Dussey d’orienter la diplomatie de son pays vers le Sahel.

 

 

 

 

Prudent et méticuleux, le ministre togolais des affaires étrangères « sait que tenir le Sahel, c’est tenir Paris par les couilles » analyse un diplomate belge en poste à Bamako au micro de Afrika Stratégies France. Faure Gnassingbé sera donc l’interlocuteur idéal de l’Afrique pour l’Élysée qui, peinant à faire face à la pandémie de coronavirus en France, perd les pédales sur le continent africain. Quant à Agbéyomé Kodjo, il sera le sujet de toutes les allergies de Lomé II.

 

 

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Agbéyomé Kodjo ne sera pas évoqué

Dans la valise du président togolaise, un journaliste qui n’a pas manqué d’attaquer Agbéyomé Kodjo ces derniers jours. Jean Paul Agboh. Le patron de Focus Info a pu être repêché dans la délégation avec l’insistance de Victoire Dogbé, première ministre et mentor du controversé journaliste. Le candidat arrivé en 2e position avec près de 20% des voix officiellement sera à la touche.

 

 

 

Des rumeurs couraient sur le déplacement en France de Kodjo « pour tenter de perturber le voyage », ce qui a obligé non seulement Lomé II à en demander le report, puisqu’il était préalablement prévu au 1er avril, mais aussi à garder le secret jusqu’au dernier moment.

Paris a même tenu à l’œil, ses derniers jours, tout déplacement du principal opposant togolais vers Paris, insistant auprès des consulats sur le fait que le visa que détient Agbéyomé Kodjo dans son passeport diplomatique « est valide mais nécessite une note verbale » que Robert Dussey ne lui délivrera naturellement pas. Une manière d’empêcher le gouvernement virtuel, mis en place par le candidat malheureux dans la diaspora, de pouvoir mobiliser grand monde. « Mais rien n’est tard » clame la Dynamique Mgr Kpodzro (Dmk) qui a porté la candidature de l’ex Premier ministre.

 

 

Au pouvoir depuis 2005, à la suite du décès de son feu père, Faure Gnassingbé a été élu en 2010, 2015 et 2020 à la suite de scrutins tous aussi controversés les uns que les autres. Mais son influence au Sahel devrait conforter le titre de « jeune doyen » que le président ivoirien lui a attribué. A raison.

 

 

Max-Savi Carmel