«Quel que soit ce que nous réservent les jours ou mois à venir, ce dernier trimestre nous aura révélé le courage, l’intelligence, la hargne de vaincre, l’expérience, et l’amour pour son peuple d’un homme: Messan Agbéyomé Kodjo, et la détermination d’un vieux prélat de 90 ans, Monseigneur Fanoko Kpodzro.
Les deux personnalités nous auront appris que l’habit ne fait pas forcément le moine; en d’autres termes, des décennies dans l’opposition ne sont pas forcément une garantie qu´on a de l’amour pour son peuple…»
C’est en ces termes que nous concluions un de nos derniers articles sur la situation politique togolaise. Aujourd’hui, quelques semaines après la publication de ce texte, nous pouvons affirmer en ajoutant que le travail de la dynamique Monseigneur Fanoko Philipe Kpodzro, surtout pendant cette période de résistance intelligente contre le èniéme hold-up électoral de Faure Gnassingbé, aura mis à nu l’amateurisme et surtout la méchanceté d´une certaine opposition togolaise, non pas contre Messam Agbéyomé Kodjo, mais contre un peuple auquel on a promis la libération.
Certes, nous n´étions pas parmi les grands partisans des élections sans réformes, et surtout avec Faure Gnassingbé comme candidat; et c´est pourquoi nous n´étions pas non plus parmi les premiers supporters de l´initiative du vieux prélat.
Mais connaissant bien les réalités de la lutte pour notre libération depuis les années´90, considérant la mise sous éteignoir de la mobilisation populaire par la terreur militaire, la configuration tribale de notre armée ne permettant pas, pour le moment, un coup d´état salutaire, nous n’avons que les élections pour espérer un miracle; surtout après une très bonne campagne du candidat de la dynamique.
Et le miracle est possible si toute l’opposition arrivait à parler d´une voix. Beaucoup de ceux qui aujourd’hui dans la diaspora surtout, sont emballés par l’écrasante victoire de Messan Agbéyomé Kodjo et soutiennent la dynamique Kpodzro pour récupérer la victoire des mains de l’usurpateur Faure Gnassingbé, n’étaient pas au début partants pour des élections dans les conditions que tout le monde connaît. Et les supporters de la dynamique Monseigneur Kpodzro sont des Togolais et des Togolaises qui veulent le départ du régime Gnassingbé sans considération partisane.
Pour ces citoyens, il ne pas y avoir de conditions à poser au sein de l’opposition pour faire déguerpir une dictature militaro-clanique comme celle du Togo qui a fait et continue à faire des ravages sur le plan social et surtout humain au sein de sa population.
C’est pourquoi nous ne comprenons pas que des leaders de l’opposition ou leurs supporters, à la création de la dynamique, pourtant consultés pour donner leur point de vue, ont commencé à envoyer des flèches empoisonnées vers la mouvance autour du prélat pour noircir son candidat.
Mais les leaders qui s’en étaient pris et s´en prennent encore à Messan Agbéyomé Kodjo, l’auraient-ils fait s´ils étaient le candidat désigné? Ce que nous pouvons appeler le crime contre le peuple est cette curieuse exigence de ce grand parti de l’opposition envers la dynamique Kpodzro à présenter les preuves de sa victoire pour un éventuel soutien. Certains Togolais sont-ils tombés sur la tête, et ne savent plus ce qu´ils font?
La dynamique et Messan Agbéyomé Kodjo ne se battent pas pour construire un grand marché à Tokpli, village natal du candidat élu; mais pour que l´alternance tant souhaitée, pour laquelle beaucoup de Togolais et Togolaises continuent à payer de leur vie, soit enfin une réalité.
Pire, on attend tranquillement que Agbéyomé Kodjo et Monseigneur Kpodzro se débrouillent seuls pour venir présenter sur un plateau d´argent le pouvoir, tout simplement parce qu´ils l´auraient promis aux Togolais pendant la campagne; non seulement une telle attitude est stupide, mais elle est très méchante et à la limite criminelle, pas contre la dynamique Kpodzro, ni Agbéyomé lui-même, mais contre le peuple.
Nous voulons rappeler à ceux qui pensent que soutenir la dynamique Kpodzro serait un crime de lèse-Majesté et nuirait aux intérêts de leur parti, que de tels soutiens à des mouvances politiques ont déjà eu lieu dans le passé, sans que les soutiens concernés aient renoncé à leur couleur politique de départ.
En 2005, autour de Bob Akitani, candidat de l’UFC, on avait retrouvé tous les grands leaders de l´opposition pour le soutenir parce qu´il était celui qui avait gagné les élections.
Nous nous rappelons, comme c´était hier, de cette déclaration de Me Yaovi Agboyibo (paix à son âme) quand le régime RPT-UNIR opérait son hold-up électoral: « C´est Bob Akitani le gagnant de ces élections, nous avons les chiffres en notre possession…»
Léopold Gnininvi, Yaovi Agboyibo, Zarifou Ayéva…. étaient tous présidents de partis, et cela ne les avait pas empêchés de faire bloc autour du candidat de l’opposition sorti premier.
En 2010 c’était le soutien à Jean-Pierre de l’ANC de tous les leaders des grands partis politiques de l’opposition, sans oublier l´éternel soutien de la diaspora togolaise partout dans le monde. Les années de marches vers la plage pour revendiquer la victoire volée par le pouvoir n’étaient pas seulement l´oeuvre des partisans de l’ANC, mais c’était sous le parapluie du FRAC (Front Républicain pour l’Alternance et le Changement) qui regroupait plusieurs partis politiques et associations de la société civile. Et tous les éléments de ce petit monde qui venaient d´origines diverses étaient totalement libres de garder leur identité politique d´origine.
Et tous ces membres ou responsables de partis ou d´associations qui s´étaient mobilisés autour de Jean-Pierre Fabre et son parti n´étaient motivés que par une seule chose: mettre fin à la dictature des Gnassingbé.
En aucun moment, que ce soit en 2005 ou en 2010, personne n´avait conditionné son soutien à une quelconque présentation de preuves. Pour nous il n’y a pas d’argument qui vaille pour refuser de se rassembler autour de cet alibi légal que constitue la victoire de Messan Agbéyomé Kodjo pour faire pression sur un Faure Gnassingbé apeuré, affaibli et acculé de tous les côtés, surtout après l’assassinat du Colonel Madjoulba Toussaint Bitala, et le pousser vers la sortie.
Au lieu de cela, nous assistons quotidiennement à des attaques contre la dynamique Kpodzro et l’élu du peuple Messan Agbéyomé de la part de ceux qui se disent encore opposants, de telle sorte qu´un observateur étranger qui vient d´atterrir au Togo, aurait de la peine à dire vraiment à quoi ou à qui s’oppose au juste cette opposition togolaise; au régime Gnassingbé qui règne depuis plus d´un demi-siècle et dont les crimes ne se comptent plus, ou à un regroupement de partis de l´opposition qui cherche à mettre fin à la dictature?
Que les choses soient claires: nous sommes de ceux qui croient que Monseigneur Fanoko Philipe Kpodzro est à féliciter et à encourager pour son engagement et son courage sans pareils malgré son âge avancé. S´il y avait des courageux pour dire haut ce que beaucoup, par hypocrisie ou par calcul mesquin, murmurent, il n´y aurait pas eu tant de traîtres depuis les années ’90, et beaucoup de nos compatriotes ne seraient pas morts pour rien.
Mon ami Fulbert Attisso n’avait-il pas raison quand il titrait l’une de ses dernières tribunes comme suit: « Au Togo, l’opposition est devenue l’ennemie de l’opposition »?
Samari Tchadjobo