Qu’est-il advenu des milliards de phosphate?

 

 

 

Selon un récent rapport de la Banque Centrale des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Bceao), publié sur la production du phosphate au Togo, la production nationale du sel de l’acide phosphorique servant à la fabrication de l’engrais a doublé en 2020.

 

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De façon spécifique, pour le compte de l’exercice écoulé, le Togo a produit 1 321 345 Tonnes contre 799 775 en 2019. L’exhibition de ces chiffres qui satisfont évidement au sommet de l’Etat contraste avec la conjoncture sociale de plus en plus aigüe au pays.

 

 

En l’état, ces chiffres actualisés s’inscrivent dans une tendance haussière. Ceci, en comparaison avec le tableau de ces dernières années qui a affiché des résultats moins biens. En effet, le Togo a connu un tassement relatif, avec une production s’établissant respectivement à environ 732 500 tonnes et 843 000 tonnes.

 

Comme l’on peut s’y attendre, le franchissement de la barre de production d’un million de tonnes est loué par le régime cinquantenaire de Lomé par l’attention particulière qu’il accorde au secteur minier ces dernières années. Laquelle attention est traduite notamment par d’importants investissements dédiés à la modernisation du secteur extractif au Togo.

 

On parle de plus de 200 milliards FCFA pour huiler le plan de relance élaboré par les pouvoirs publics, avec l’ensemble des acteurs, tant nationaux qu’internationaux.

 

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Satisfaction contrastante

Rebelote ! Est-on en droit de s’exclamer, à voir le traditionnel tintamarre fait autour de ce qui s’apparente, sur le papier, comme une prouesse mais dont les Togolais ont du mal à ressentir les retombées. En effet, 1 321 345 tonnes d’acide phosphorique produits, cela fait des booms de milliards qui viennent renflouer les caisses de l’Etat. Implicitement, on devrait voir le visage du social et autres obligations de l’Etat vis-à-vis du citoyen luire. Tellement des problèmes sont en suspens.

Malheureusement, force est de constater que cette prouesse n’a point impacté le social, tant on se rend compte qu’à ce jour, aucun hôpital public ne dispose toujours pas de scanner. Il y a donc plus d’un an que le combat contre la crise sanitaire à Coronavirus se fait avec un plateau technique dégarni. Les discours au sujet de la commande des scanners sont toujours restés sans suite.

 

Outre le cadre COVID, régions, préfectures et cantons du pays souffrent d’un manque criard de centres de santé adéquats à même d’accueillir les patients. Même pour des maux les plus bénins. S’agissant du secteur de l’éducation, les salles de classes demeurent toujours dans un état de délabrement avancé avec toutes ses conséquences pour les élèves et enseignants. La mort de deux élèves, il y a quelques jours, dans la préfecture de Sotouboua est une illustration parfaite de cette navigation à vue qui ne dit pas son nom.

 

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A Kara, par ailleurs, il nous revient que les étudiants réclament leurs allocations, pendant qu’on ne cesse d’enfoncer le pauvre contribuable au jour le jour : au même moment qu’on leur soutire la Taxe sur le véhicule moteur (TVM), l’autre faux frais payé sur l’importation des véhicules et versé à la polémique société Antaser est passé à 25 000 F pendant les prix des péages ont augmentés de 40%, avec les 2 roues et tricycles qui sont désormais inclus.

Dès lors, au regard de tous ces cas fâcheux, on se pose des questions sur la plus-value tirée de cette production record de phosphate tant louée, si tant est que les retombées ne servent finalement même pas à améliorer le social dans le pays. Pire encore, servir à rénover les cités de Kpémé qui présente aujourd’hui un visage piteux, au regard de son état de délabrement avancé.

 

Le social sacrifié sur l’autel de la sécurité ?

Où est donc passé l’argent ? Se demandent nombre d’observateurs après écoulement de cette matière brute sur le marché. A l’analyse, l’on en vient à se demander si cette fortune, plutôt que de servir, au plan social, ne sert-elle pas finalement à restructurer l’armée togolaise qui se taille une place de choix dans le budget 2021.

 

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En effet, des chiffres actualisés révèlent qu’en deux ans, le Togo a dépensé 315 millions de dollars, soit 15 milliards CFA en achats d’équipements militaires. Une vision budgétivore qui s’est traduite ces derniers mois par le vote de la loi de programmation militaire qui prévoit 700 milliards de FCFA pour l’achat de matériels militaires et le renforcement des effectifs.

 

Sans pour autant être affirmatif, tout porte à croire vraisemblablement que le social se trouve sacrifié sur l’autel de la sécurité et de la lutte contre le terrorisme qui semblent préoccuper plus le régime de Faure Gnassingbé. Prévenir le terrorisme Oui, mais on sait également que ce sont les indignations sociales qui constituent les terreaux du terrorisme.

Est-il que le tableau social au Togo est marqué aujourd’hui par la vie chère pendant que l’exécutif se frotte les mains devant un boom phosphatier des plus inattendus. Bien dommage pour le Prince qui, après un quart de siècle d’année passée au pouvoir, ajouté aux 38 ans de son géniteur, n’arrive toujours pas à donner du sourire aux Togolais.

 

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Togoweb