Un article de Libération provoque la colère du camp d’Agbéyomé Kodjo

En dehors des médias locaux, certains journaux internationaux se sont également intéressés à l’arrestation de l’ancien Premier ministre Gabriel Messan Agbéyomé Kodjo. Le journal français Libération, par exemple, a publié mardi dernier un article sur cette actualité.

 

Sauf que l’article en question n’a pas du tout été apprécié par le camp Agbéyomé Kodjo qui l’a fait savoir à travers un courrier adressé aux responsables du journal Libération.

 

 

Nous  vous proposons l’intégralité de l’article du journal Libération:

 

Candidat malheureux à la présidentielle du 22 février, Agbéyomé Kodjo a refusé de reconnaître sa défaite et dénonce une fraude électorale massive. Enfermé chez lui depuis deux mois, il a été interpellé ce mardi.

 

 

Depuis l’élection du 22 février, Agbéyomé Kodjo se présentait comme «le président démocratiquement élu de la république togolaise», balayant les résultats définitifs de la Cour constitutionnelle, grossièrement truqués selon l’opposition, qui le créditaient de seulement 19% des suffrages contre 71% pour le chef de l’Etat sortant, Faure Gnassingbé.

Discours officiels sous le drapeau étoilé du Togo, nomination d’un Premier ministre, d’un ministre des Affaires étrangères, publication de décrets avec en-tête de la République… Pendant deux mois, Agbéyomé Kodjo a poussé le jeu de rôle à fond. La mascarade ne pouvait pas durer, a estimé l’autre président, le vrai, celui qui tient le Togo depuis qu’il s’est assis dans le fauteuil de son père, en 2005.

 

Blindés légers

Ce mardi, à 9 heures, les gendarmes ont défoncé le portail de sa résidence pour faire cesser la comédie. Depuis la veille au soir, les forces de sécurité avaient bouclé son quartier, Forever, dans le centre de Lomé, et des blindés légers avaient pris position autour de la maison.

 

 

Lors de l’opération, l’archevêque émérite de Lomé, Monseigneur Kpodzro, premier soutien d’Agbéyomé Kodjo, aurait été «bousculé» et serait «tombé en syncope», selon un porte-parole du parti. «Le prélat n’a jamais été touché», affirme au contraire un responsable gouvernemental.

 

L’influent religieux, âgé de 90 ans, est l’un des défenseurs les plus acharnés de Kodjo. Il vivait depuis plusieurs semaines à son domicile : «Il ne bougera pas sans moi, à moins qu’ils passent sur mon cadavre», avait-il menacé.

 

 

Pour la troisième fois, la veille, Agbéyomé Kodjo avait été convoqué pour une audition par le procureur de la République. «Ultime invitation», avait cette fois surligné l’expéditeur. Par le passé, le candidat malheureux avait refusé de se déplacer en prétextant des «problèmes de santé».

 

Son immunité parlementaire a été levée le 16 mars par un vote de l’Assemblée nationale, mais ses avocats ont introduit un recours devant la justice, qu’ils espéraient suspensif. En vain.

 

Ce mardi, Kodjo a été conduit au Service central de recherches et d’investigations criminelles, en attendant d’être présenté au procureur, pour qui «ses propos et agissements» relèvent «des qualifications de troubles aggravés à l’ordre public et d’atteinte à la sécurité intérieure de l’Etat».

 

«Larmes de crocodile»

En dépit de «l’appel au secours» lancé par Mgr Kpodzro dans la nuit sur les réseaux sociaux, aucun rassemblement n’a été signalé mardi à Lomé. «Le candidat Kodjo a bénéficié d’un vote d’adhésion massif, entre autres à cause de son profil d’ancien baron du régime [il a été Premier ministre du père Gnassingbé, ndlr], de ses relations supposées ou réelles au sein du régime, surtout de l’armée, son carnet d’adresses à l’international, tous ces éléments brandis lors de la campagne ont rassuré, juge Ferdinand Ayité, directeur de publication du journal d’investigation l’Alternative. Mais il n’a pas de base populaire. Ses électeurs ne sont pas des militants qui vont descendre dans la rue et braver les balles de la police.»

 

Quant au reste de l’opposition «historique», régulièrement étrillée par le camp Kodjo, elle est restée également silencieuse. «Ils verseront peut-être des larmes de crocodile, mais en réalité, tout le monde regarde ça de loin, poursuit le journaliste. Faure Gnassingbé est rancunier. Pour lui, Agbéyomé est un traître qui est passé à l’ennemi : son comportement est un affront qui doit se laver par une humiliation.»

 

 

Togoweb