Le mécontentement est général dans les pays de l’Union économique et monétaire ouest-africaine. Après le président sénégalais Macky Sall qui s’en est plaint, c’est au tour du ministre togolais de l’économie et des finances de trouver que le loyer de l’argent est trop cher. Pourtant, les conditions sont réunies pour que les taux d’intérêt restent faibles.
Pour Sani Yaya, le ministre togolais de l’Économie et des finances «les taux d’intérêts débiteurs ressortent toujours à des niveaux relativement élevés, en dépit des détentes observées en 2020 par rapport à 2019», compte tenu de l’effort consenti par «la Banque Centrale des États de l’Afrique de l’Ouest qui a baissé son taux directeur à 2%, à compter du 24 juin 2020». Il faisait ce commentaire à l’issu du dernier conseil des ministres qui s’était réuni le 24 décembre.
Huit jours plus tôt, c’est-à-dire le 16 décembre, c’est le président Macky Sall lui-même qui tapait du poing sur la table pour demander que les taux d’intérêt des établissements du système financier décentralisé soit revu à des niveaux suffisamment bas pour ne pas étouffer les ménages et les agents économiques qui empruntent. La raison de sa colère réside dans le fait que ces établissements de micro-crédit qui se financent auprès des banques à des taux trop élevés, répercutent cette cherté tout en tenant compte d’un risque encouru plus élevé. Du coup, leurs taux dépassent une moyenne de 16% par an.
Le malaise est général dans les 8 pays de l’UEMOA et concerne tous les types de crédits et d’échéances. A titre d’exemple, le taux de crédit immobilier est entre 8% et 12% dans la plupart des pays, ce qui frôle un taux d’usure.
Mais le paradoxe est frappant quand on sait que la Banque centrale a ramené son taux directeur à 2%. De plus, la zone de l’UEMOA affiche l’un des taux d’inflation les plus bas au monde, autour de 1,5 à 2% seulement en moyenne. Enfin, la monnaie locale, le franc CFA étant arrimée à l’euro, elle présente une volatilité extrêmement faible par rapport aux principales devises internationales. Il s’agit d’autant d’arguments qui militent tous en faveur de taux de base très faibles et qui doivent même être comparables à ceux pratiqués en Europe, à quelques différences près.
Évidemment, le seul argument qui milite en faveur de taux élevés est la prime de risque, or il n’est établi que les entreprises ivoiriennes sont forcément moins solvables que celles qui se trouvent dans l’espace européen. C’est d’autant vrai que la plupart des crédits accordés sont adossés à d’importantes garanties, notamment des hypothèques. Tout le contraire de l’Europe. Macky Sall et Sani Yaya ont donc raison de juger excessif les pratiques bancaires en matière de taux d’intérêt, surtout qu’en cette période de Covid-19, les esprits sont tournés vers la reprise qui a grandement besoin de financement à taux corrects.
Afrimag